Le cabinet d’audit Deloitte a été choisi pour évaluer les ONG belges actives dans coopération au développement. Ce « screening » se fait selon des critères de sélection venus du management privé,  assez différents voire antinomiques des principes de solidarité et de coopération au développement. Le coût du dernier « screening » selon les données budgétaires des appels d’offres, se situent entre 550.000 et 650.000 €. Deloitte (et Price Water House Coopers avant lui, en 2010) est selon Ecolo bien mal placé pour évaluer la « bonne gestion » d’ONG qui luttent pour une coopération au développement digne de ce nom. En effet, ces deux sociétés jouent tous les tableaux : elles disent lutter contre la fraude dans les ONG mais prodiguent par ailleurs des conseils aux entreprises pour contourner l’impôt !

En effet, l’ONG ActionAid a rendu public un document confidentiel de Deloitte, dont le titre ne laisse aucune place à l’ambiguïté : Investing in Africa through Mauritius. Le cabinet Deloitte s’applique ainsi à convaincre les investisseurs d’utiliser ses services, en leur faisant miroiter les multiples avantages fiscaux d’une domiciliation à l’île Maurice afin d’échapper au fisc pour leurs projets sur le continent africain. Cette technique d’optimisation fiscale fait perdre, aux États les plus pauvres de la planète, de centaines de milliards de dollars de revenus, par année. Parallèlement, la liste des scandales fiscaux et économiques où est ou a été impliqué le cabinet Deloitte est longue. Elle concerne l’Italie, le Canada ou l’Espagne.

Dans sa réponse à une question que je lui posais récemment à la Chambre, le Ministre en charge de la Coopération, Alexander De Croo, affirme que Deloitte n’a fait « l’objet d’aucune condamnation prononcée par une décision judiciaire ». Il ajoute même : « Si Deloitte ou un autre cabinet d’audit avaient été condamnés, ils n’auraient pas accès à ce marché ». Or, comme précisé dans une carte blanche par le Comité pour l’abolition des dettes illégitimes, Deloitte est confronté à de nombreuses inculpations judiciaires, même si souvent il parvient à des accords « à l’amiable » moyennant des transactions financières. Au travail donc  !

Reste le problème politique : il est clair qu’on ne traite pas une ONG de la coopération comme n’importe quel investissement public ou privé important. Ce sont deux choses différentes. L’associatif a clairement une expertise en matière de  coopération que Deloitte – ou PwC avant lui –  n’a pas. A suivre !