« Je crois qu’effectivement, nous devons prolonger notre action en Irak vers la Syrie ». Cette déclaration de Didier Reynders (encore aujourd’hui) intervient alors que la Russie a désormais décidé d’appuyer ouvertement le régime de Bashar Al Assad en procédant actuellement à des bombardements massifs et indiscriminés des zones contrôlées par certains groupes islamistes mais aussi et surtout ce qui reste de l’opposition syrienne démocratique, en contournant la plupart du temps des zones gouvernées par Daesh. Regardez Alep !

De plus, malgré les neuf mois de l’opération Desert Falcon, où les six F-16 belges ont effectué 163 attaques lors de 796 vols au-dessus de l’Irak, la puissance militaire mais surtout l’attractivité politique de Daesh n’a cessé d’augmenter. La preuve la plus flagrante de cet échec sont les attentats de Paris et de Bruxelles où l’ennemi de nos militaires sur le terrain irakien est parvenu à recruter des jeunes de nos propres quartiers pour ce faire !

C’est pourquoi, avant de s’engager tête baissée dans un nouveau bourbier, j’ai posé les questions suivantes à Didier Reynders, lors d’une séance de la Commission des Relations extérieures de la Chambre :

  1. Comment d’éventuelles frappes aériennes belges contre les positions de Daesh en Syrie vont-elles dissuader les populations sunnites de Syrie de soutenir voir rejoindre l’organisation terroriste ? L’un des principaux enseignements des multiples campagnes aériennes en Irak est que bombarder des zones sunnites (où s’ancre Daesh) a pour effet de radicaliser les populations sunnites touchées, alors que l’objectif politique visé est – à juste titre – exactement inverse !
  2. Comment des frappes aériennes belges permettront-elles à la majorité sunnite de Syrie de trouver une place dans l’organisation de la société syrienne ?
  3. Comment des frappes aériennes belges en zones sunnites de Syrie vont-elles permettre la transition politique de la Syrie vers un modèle de représentation politique incluant à terme toutes les communautés ethniques et religieuses de ce pays ?
  4. Comment des frappes aériennes belges en zone sunnite de Syrie vont-elles tarir le flot inédit de réfugiés prenant la route vers l’Europe, sachant que l’essentiel des ces réfugiés fuient d’abord et avant tout les actions militaires barbares et les violations massives et répétées des droits humains par le régime de Bashar Al Assad et maintenant la Russie ?
  5. En quoi l’alliance militaire objective des membres de l’OTAN avec la Russie et le régime sanguinaire de Bashar Al Assad va-t-il tarir le torrent de ralliement des populations sunnites du Moyen-Orient à Daesh et partant, certains jeunes fanatisés et endoctrinés d’Europe, et donc aussi de Belgique ?

A cela, Didier Reynders (vérifiez-le) n’a pas répondu. Pire encore, alors que c’est le cœur du problème politique, aucun de mes collègues députés (dans leurs questions) ou du Ministre (dans ses réponses) n’a utilisé le mot « Sunnite » ou « Chiite ». Un nouveau débat sur une entrée en guerre va avoir lieu prochainement, il a l’air sacrément mal parti.