Depuis les différentes régionalisations et communautarisations des années 70, 80 et 90, les « compétences de représentation » internationales de la Belgique sont soit en partie (la diplomatie au sens strict et fictivement la coopération au développement), soit en tout (commerce extérieur aux régions, tourisme aux communautés) dévolues aux entités fédérées.

Dans le monde économique globalisé d’aujourd’hui, une destination touristique, une instance qui désire vendre les produits et les services de sa région à l’étranger, a besoin d’un canal de promotion fort, et donc d’une image forte et ainsi faire la différence par rapport à la kyrielle d’autres offres. Depuis que je suis employé du BITC (l’office du tourisme de Bruxelles), j’ai pu me rendre compte à quel point il était commercialement vain de touristiquement promouvoir la Wallonie et la Flandre en tant que telles.

Ces deux (importantes) réalités institutionnelles et politiques n’ont aucune signification commerciale ou touristique pour l’investisseur ou le visiteur potentiel de nos régions. Seuls les concepts de « Belgique » et surtout celui de « Bruxelles » sonnent à l’oreille des visiteurs ou clients étrangers. Ca n’est pas un voeux néo-belgicain ou bêtement pro-bruxellois, c’est un fait commercial. Et aucune campagne d’information internationale, même de grande ampleur (budgétairement inenvisageable), n’y pourrait rien.

Les intérêts économiques  de nos régions sont aujourd’hui représentées par des attachés économiques et commerciaux régionaux (parfois 3 par grande métropole étrangère!). Heureusement, un intelligent accord de coopération régional datant de l’année dernière a rationalisé les représentations commerciales et certains attachés commerciaux sont désormais en charge de la promotion de 2 voire 3 régions, au cas par cas. Mais c’est loin d’être comme ça partout.

Imaginez comment un-e attaché-e commercial-e bruxellois-e, flamand-e et wallon-ne est reçu-e auprès d’investisseurs de Chine, d’Espagne ou d’Amérique du Nord … jamais comme « régional », bien évidemment, mais comme Belge. Il s’ensuit une perte d’efficacité commerciale évidente et inutile, une gabegie de moyens publics et un brouillage total de l’image de la Belgique, sans parvenir à établir où que ce soit dans le monde une image wallonne ou flamande reconnue et efficace. Plus illisible est encore l’image de la « Communauté française de Belgique » qui a ça et là des représentations (!) et que Mitterrand avait pris pour une association d’expatriés français en nos terres !

Bruxelles, comme capitale de l’UE et point de rencontre des « tribus » belges est un cas à part. Son aura dépasse largement les frontières du royaume qu’elle chapeaute. Mais j’ai pu constater de nombreuses fois à quel point la confusion entre Bruxelles et la Belgique était totale dans l’esprit de mes interlocuteurs professionnels étrangers. Plus vous vous éloignez de nos frontières, plus la frontière mentale et symbolique s’estompe, voire disparaît … quand on sait vous dire où est Bruxelles ! Combien de fois n’ai-je pas entendu : « I love the city of Belgium ! ».

D’un point de vue touristique, les Communautés flamande et francophone en sont bien conscientes. Sans Bruxelles, pas de salut international, pas d’image, aucune chance d’avoir une place au soleil sur le marché touristique européen et mondial, surtout que la tendance du secteur est au cityrip. L’Office de promotion du Tourisme (Wallonie-Bruxelles) et Toerisme Vlaanderen (met Brussel) sont tous deux compétents pour la promotion de Bruxelles. Ils promeuvent leurs destinations de façon diamétralement opposée. Imaginez le télescopage que peut provoquer dans l’esprit du touriste potentiel une ville promue de façon différenciée, sachant que le brouhaha touristique international est assourdissant.

Je vais être un peu caricatural mais certains bureaux de tourisme flamands à l’étrangers parlent de Bruxelles comme une ville d’art flamande, au même titre que Gand ou Bruges … comme si elle n’était pas une capitale européenne, cosmopolite, internationale, latine et branchée. Soit bien plus. Heureusement, les liens humains créeent du liant entre les différentes instances responsable du tourisme bruxellois, mais institutionnellement, tout est fait pour mettre des bâtons dans les roues des professionnels de bonne volonté.

Fort heureusement, à l’initiative de Philippe Close (échevin bruxellois PS du tourisme) et d’Evelyne Huytebroeck (ministre Ecolo du tourisme à Bruxelles), une collaboration étroite a pu se nouer entre le BITC (Bruxelles) et l’OPT (Wallonie-Bruxelles) pour se mettre d’accord, ensemble sur la façon adéquate de promouvoir la Ville. Aujourd’hui, la région capitale est donc promue de 2 façon différentes (une francophone et une flamande). Sans cet heureux accord, on risquait de voir la ville représentée 3 fois, soit à la sauce flamande, francophone ou bruxelloise. Ri-di-cule.

Du chemin reste à parcourir. Je suis persuadé qu’un accord de coopération intercommunautaire doit s’établir au niveau de la compétence touristique. Les communautés doivent s’entendre pour (re)partager des représentations touristiques communes à l’étranger, et profiter conjointement de Bruxelles comme porte d’entrée et vitrine de leur région respective. Bruxelles doit pour sa part avoir son mot à dire sur la façon dont elle veut être représentée, au bénéfice total de chacune des parties.

Au niveau du commerce extérieur, une refédéralisation pure et simple est ultra-nécessaire, commercialement logique. La gabegie de moyens financier et humains est trop forte.

Ceci était le premier article qui porte directement sur les questions des relations internationales au sens large. La suite pour tout bientôt.


Mise à jour au 24/01/2008 :

Pour celles & ceux que ça intéresse, j’ai fait une petite actualisation sur la question des quotas d’émissions de CO2 dans mon avant-dernier article, intitulé 20%. Bonne lecture !