Les défenseurs du nucléaire s’organisent. En revenant d’un voyage professionnel à Belgrade ce vendredi soir (je vous raconte tout ça ici), je lisais dans le Libération déposé sur mon siège d’avion que l’ancien président français Giscard avait pris la tête d’un comité de défense du paysage français, contre l’énergie éolienne.

Dans l’interview (à lire ici), il annonce clairement la couleur, sans même prendre les gants que d’autres nucléocrates ont l’habitude de prendre : il est contre l’éolien parce que sa promotion (actuellement massive) est contraire aux intérêts de la production nucléaire d’électricité :

« Pourquoi fabrique-t-on de l’électricité plus chère alors que grâce au nucléaire nous avons des surplus ? La France est de loin le pays le plus en avance d’Europe pour l’électricité non productrice de CO2, grâce au nucléaire. »

Je ne reprendrai pas tous les arguments anti-nucléaires que j’ai déjà avancés ici (déchets, sécurité, CO2, question de concurrence). Cet interview de Giscard confirme de façon patente nos convictions écologistes : tant que le nucléaire sera maintenu dans son monopole (l’objectif de Giscard … et de certains de ses amis Belges, souvenez-vous), ce sera  au détriment de l ‘émergence d’énergies alternatives, propres et durables, dont l’éolien. Giscard ne se contente pas de dire (erronément d’ailleurs) que le nucléaire serait plus efficace, il se bat de façon frontale contre les moulins à vent dont l’arrivée empêche le secteur nucléaire de s’engraisser.

N’oublions pas que les centrales nucléaires ont été, en France comme en Belgique, très largement financées par l’Etat, dans les années 70 et 80, tout comme l’est l’énergie verte aujourd’hui (via les certificats verts). Que par après, les opérateurs privés (Electrabel-Suez chez nous) se sont « servis sur la bête » en fixant des prix prohibitifs, justifiés par l’« amortissement » des centrales. Aujourd’hui que les centrales sont « amorties », Suez souhaite pouvoir prolonger la vie de ses réacteurs, histoire de pouvoir « manger sur la bête » encore plus longtemps

Dans ce contexte, le gouvernement fédéral belge a prévu 250 millions d’euros de contribution exceptionnelle des électriciens dans son son budget 2008. Le ministre de l’Energie Paul Magnette, a été chargé par ses collègues d’aller quémander cette importante somme d ‘argent auprès des opérateurs électriques, à commencer par Suez-Electrabel (ultra-dominant).

Il n’y est pas parvenu. Et pour cause … Quelle naïveté confondante de croire que cette multinationale allait délier sa bourse au premier aboiement ministériel, alors que celle-ci n’est demandeuse de rien. Par contre, l’Etat belge se présente dans la négociation genoux à terre : il a besoin de cet argent pour boucler son budget. Evidemment, Electrabel-Suez tient Magnette par la barbichette. Tout le monde sait ce que l’électricien exige (secrètement) pour cracher le magot : prolonger la vie des réacteurs nucléaires belges.

En attendant l’issue de ce bras-de-fer où ce sera inévitablement le citoyen-consommateur qui paiera la facture, vous pouvez lire les instructives publicités d’Electrabel. Toutes les boites aux lettres belges ont reçu un magazine gratuit appelé « Energique ». On y trouve toutes sortes de magnifiques photos, incrustées dans un graphisme coloré et attractif. 95% de l’énergie électrique par Electrabel est produite par des réacteurs nucléaires dangereux et polluants, mais une page sur trois de ce magazine montre des éoliennes, des papillons, des vélos, de l’herbe, de l’eau, des enfants ou des panneaux photovoltaïques … C’est ce qui s’appelle du greenwashing, ce dont je vous parlais déjà ici.

Le pire est malheureusement à venir. Le magazine vous offre des recettes et … des conseils loisirs. Comme par exemple, en page 42 et 43. Deux pages consacrés aux endroits où chiner en Belgique. Je connais des survivants de l’holocauste, des antifascistes ou de simples citoyens qui ont du s’étrangler en voyant ce qui sert d’illustration au marché aux puces de Sint-Jacobs à Gand : un uniforme nazi trône au beau milieu de la photo !

En Allemagne, ce genre d’uniforme est tout simplement illégal sur la voie publique, pas en Belgique – Flandre visiblement. Je n’ose pas imaginer que cette photo ait été offerte par mes collègues de l’Office du Tourisme de Gand ou de Toerisme Vlaanderen. Les photos illustrant la Place du jeu de Balle de Bruxelles proviennent pourtant de la banque de données de l’Office de Promotion du Tourisme Wallonie Bruxelles. Dans tous les cas, un directeur marketing va se faire tirer les oreilles chez Electrabel-Suez …

Bref, que cette regrettable idiotie électrabélienne supplémentaire vous incite à passer définitivement vers un producteur d’énergie verte. Je vous expliquais déjà comment faire ici.