Samedi dernier, une centaine de militant-e-s d’Ecolo ont défilé, comme chaque année, avec Groen à la Belgian Lesbian & Gay Pride. Tous ensemble, nous avons distribué 6.000 mini tatouages aux acteurs et spectateurs de cette grande fête de la diversité, un record ! L’accueil fut extraordinairement positif. Un vrai grand moment militant.

J’ai la chance d’animer depuis quelques années déjà la Commission Ecolo Nous Prend Homo, le seul groupe politique francophone qui travaille sur les questions LGBT, toute l’année durant. Nous avons ainsi pu irriguer le programme Ecolo de multiples propositions novatrices et progressistes, totalement en phase avec le vécu et les attentes du monde associatif LGBT. Vous pouvez en lire les grandes lignes ici, ainsi que découvrir les candidat-e-s qui portent ces projets.

Alors, pourquoi défiler, encore et encore alors que les très grands dossiers comme le mariage ou l’adoption homos sont désormais aboutis ?

Une seule réponse : Nicolas. Et cette personne pourrait s’appeler Sophie, Fatiha ou Kevin. Nicolas est un jeune gars de 17 ans, qui s’est suicidé à Enghien au début de la semaine dernière. Il n’a laissé à sa famille aucune trace expliquant son terrible geste. Mais ses proches savaient que Nicolas se sentait différent et le vivait mal. Comme de très nombreux gays ou lesbiennes, cet adolescent subit de plein fouet l’homophobie qui reste prégnante dans nos sociétés, même particulièrement tolérantes. Et la pire des homophobies est celle que l’on exerce contre soi-même.

Je ne connais pas l’histoire de Nicolas dans le détail, mais l’ado en questionnement que j’étais à Huy il y a 14 ans a vécu le même genre de doutes, d’interrogations, de peurs, d’effroi et de mal-être. A 18 ans, débarqué à Bruxelles, mon premier acte d’adulte était d’aller donner mon sang à la Croix-Rouge, comme mon grand-père l’a fait 40 ans durant. C’est alors que j’ai lu que les « hommes ayant eu des rapports sexuels avec d’autres hommes » étaient interdits du don de sang. Imaginez l’effet qu’une telle interdiction peut avoir dans l’esprit d’un jeune. L’image de l’homosexuel (qu’il n’est parfois même pas encore !) est alors prédégradée, forcément liée à la pire des maladies, à l’horreur et la dépravation.

Pour justifier cette position, la Croix-Rouge et ses défenseurs invoquent la présence d’un nombre proportionnellement plus élevé de séropositifs (ou autre) au sein de la population homosexuelle masculine que dans la population hétérosexuelle.

C’est une prévalence tout à fait réelle, qui justifie d’autant plus les actions de prévention ciblées sur les gays. Cependant, un-e hétérosexuel-le multipliant les rapports sexuels à risque sera automatiquement écarté-e du don de sang, pour des raisons sanitaires évidentes. De la même façon, un-e homosexuel-le qui a eu des comportements sexuels à risque se doit d’être écarté-e du don de sang. A l’heure actuelle, même un candidat donneur homosexuel se présentant dans un centre de la Croix-Rouge avec un test HIV négatif se voit opposer un refus à son don …

Rudy Demotte et Laurette Onkelinx (PS), les ministres fédéraux qui se sont récemment succédés à la Santé publique ont systématiquement soutenu la thèse de la Croix-Rouge lors de plusieurs interpellations parlementaires de la Députée fédérale Zoé Genot en avril 2005, avril 2006, mai 2008 et tout dernièrement en février 2009 (toutes lisibles ici).

Pour appuyer leurs positions, les ministres successifs invoquent systématiquement des études de l’Institut Scientifique de Santé Publique dont le site Internet censé reprendre la recherche en question est un modèle d’opacité.

Pour Ecolo comme pour moi, Laurette Onkelinx doit agir. Elle peut donner l’injonction à la Croix-Rouge d’adopter un nouveau processus de sélection des donneurs. Il faut exclure du don de sang toute personne (hétérosexuelle ou homosexuelle) adoptant des comportements représentant un risque pour le receveur, sans stigmatiser d’emblée un groupe entier de donneurs sur base de leurs comportements sexuels présumés.

Voilà pourquoi il faut continuer le combat, dans les Gay Prides, dans les Parlements, dans la vie de tous les jours, en s’affirmant comme homosexuel-le-s partout où on le peut, ni plus, ni moins, sans strass mais sans honte. La visibilité des homosexuel-le-s est fondamentale, dans tous les milieux, c’est la seule façon pour qu’un … Nicolas (ou un-e autre) ne commette pas l’irréparable, encore et encore.