TTIP (3)
Ambiance hier aux abords du palais d’Egmont Ă Bruxelles, endroit oĂč se tenait l’European Business Summit, sorte de grand-messe patronale autour du sacro-saint principe du libre-Ă©change. Comme plusieurs fois auparavant (souvenez-vous), les Ă©cologistes se sont joints aux syndicats, aux associations de dĂ©fense des droits humains et de l’environnement pour dĂ©noncer la mĂ©thode et de le contenu de la nĂ©gociation en cours autour du probable traitĂ© transatlantique (TTIP). Je ne reviendrai ici pas sur l’inacceptable violence dont ont Ă©tĂ© victimes les manifestants qui protestaient pacifiquement aux abords de la Place StĂ©phanie. Tout a Ă©tĂ© dit et Ă©crit Ă ce sujet.
Cet Ă©vĂšnement m’amĂšne Ă cette rĂ©flexion sur la meilleure façon de combattre ce monstre cachĂ©. Cela fait plus d’un an et demi qu’avec mes collĂšgues d’Ecolo Philippe Lamberts, Isabelle Durant et StĂ©phane HazĂ©e nous travaillons Ă mettre en lumiĂšre les enjeux de ce TTIP, au Parlement europĂ©en, au Parlement wallon et au SĂ©nat. Le hasard a voulu que c’est au moment oĂč les manifestants dĂ©nonçaient la collusion entre le big business et les nĂ©gociateurs europĂ©ens et amĂ©ricains du TTIP lors de ce Summit qu’enfin la question transatlantique a Ă©mergĂ© dans les mĂ©dias belges. Et si des dĂ©putĂ©s d’Ecolo n’avaient pas Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©s avec 250 autres citoyens engagĂ©s, la presse n’en aurait peut-ĂȘtre jamais parlĂ© ! C’est le seul point positif de la journĂ©e d’hier.
Parce qu’en fait, les lobbies des multinationales ont tout intĂ©rĂȘt Ă continuer leur jeu d’influence dans les couloirs des grands hĂŽtels de Bruxelles, de Washington ou de la Commission europĂ©enne, Ă l’ombre. Ceux qui ont intĂ©rĂȘt Ă mettre en place un gigantesque marchĂ© entre les deux rives de l’Atlantique veulent par cet accord atteindre des objectif de dĂ©rĂ©gulation, d’harmonisation par le bas de nos normes sociales, sanitaires et environnementales , en plus de la mise sous tutelle de nos dĂ©mocraties europĂ©ennes par une sorte de mĂ©canisme imbuvable de tribunal arbitral oĂč une multinationale pourrait attaquer un Etat qui contreviendrait par ses rĂšgles Ă contre le principe de libre-Ă©change. Ce qui s’est passĂ© hier, c’est la mise en lumiĂšre crue de ce mĂ©canisme imbuvable de la nĂ©gociation biaisĂ©e et en “schmet” oĂč les intĂ©rĂȘts des gros sont avantagĂ©s par rapport Ă tous les autres : travailleurs, santĂ© des citoyens, environnement, PME, TPE ⊠le coeur car la trĂšs grand majoritĂ© de ce qui fait notre sociĂ©tĂ© et de notre Ă©conomie.
Alors les Ă©vĂšnements d’hier Ă©taient terribles mais une fois la colĂšre passĂ©e, ils m’ont paradoxalement rĂ©chauffĂ© le coeur, mĂȘme si la plupart de mes vĂȘtements Ă©taient mouillĂ©s par les autopompes. Car j’Ă©tais beaucoup moins seul qu’au SĂ©nat, le 20 mars dernier, oĂč lorsqu’on analysait une rĂ©solution sur la “rĂ©industrialisation de l’Europe“, les partis de la majoritĂ© ont refusĂ© d’intĂ©grer une sĂ©rie de mes amendements sur les dangers que pouvaient reprĂ©senter le traitĂ© transatlantique pour les normes sociales et environnementales mais aussi les choix industriels que le Continent pourrait faire Ă l’avenir pour recrĂ©er un tissus industriel durable. Jamais, par la volontĂ© du PS, du MR et du cdH, ma rĂ©solution plus globale sur le TTIP n’aura Ă©tĂ© mise Ă l’ordre du jour du SĂ©nat, malgrĂ© l’actualitĂ© patente, malgrĂ© ma demande rĂ©pĂ©tĂ©e de voir celle-ci traitĂ©e en urgence.
Des menottes aux poignets de ces 250 valeureux manifestants et des centaines de litre d’eau d’autopompe auront donc Ă©tĂ© plus efficaces que les rĂ©solutions ou les rĂ©unions de commission des parlements, que les questions parlementaires, que les communiquĂ©s de presse, que la lettre ouverte Ă Obama lors de sa venue Ă Bruxelles (oĂč il venait Ă©videmment donner un coup de pouce Ă ces nĂ©gociations) ou encore la confĂ©rence-dĂ©bat d’Ecolo et Etopia organisaient il y a une semaine encore. C’est bien la preuve que c’est une alliance entre politiques progressistes et mouvements citoyens engagĂ©s qui peut faire changer les choses. C’est ma façon de faire de la politique. C’est ECOLO.